La Laïcité système de paix sociale ou pacte du diable entre religions ?
Hamda Ouakel
L’Association humaniste du Québec a établi un échange transatlantique avec Hamda Ouakel dont les propos nous paraissent frais et éclairants pour les humanistes. Né en Tunisie dans une famille bédouine nombreuse peu de temps avant l’indépendance, Hamda Ouakel a grandi dans un environnement hostile à l’intelligence, la liberté et plus spécialement à la femme. Exilé politico-économique, installé en Suisse, retraité actif dans le bénévolat, politiquement plutôt à gauche, il se définit comme humaniste et libre-penseur athée.
Mais au fait, l’Autre, c’est qui ? C’est le mouton noir ? Possible, mais pas que. En réalité, il ne faut pas le chercher loin, il est ici et là. Partout. Souvent, il est face à vous. Mais si vous ouvrez bien les yeux en vous regardant, vous ne pouvez pas le rater. Vous le voyez ? Il est niché en vous. Ah bon ! L’Autre c’est bien moi alors ? C’est exact, c’est bien vous. Au regard de l’Autre vous êtes l’Autre. Dans
l’absolu, l’Autre est nécessairement relatif. Il n’existe qu’en votre présence. Lui, il est fatalement vous, et vous, vous êtes fatalement lui. Ce n’est qu’une affaire de regard et rien d’autre. Nous le sommes tous. Mais alors, si nous étions aveugles, nous aurions pu éviter ce problème, n’ayant plus de regard ? Malheureusement pas, mais même en admettant ce que vous avancez, cela ne voudra pas dire se débarrasser de tous les ennuis. Parce que, si tel était le cas, notre monde serait incolore. N’oubliez pas que l’absence de couleur est
synonyme d’absence de lumière. Ce n’est pas en se cachant ou en masquant les choses que celles-ci disparaissent. Si si, elles disparaissent de votre champ de vision ou votre vision se dérobe devant son existence, mais elles demeurent présentes. En plus, dans les nuits, toutes les nuits, les peurs et les malheurs y font leurs nids.
Grâce à la tolérance, nous arrivons à concevoir l’existence de l’Autre, nous lui reconnaissons certains droits et nous respectons ses libertés. La tolérance est une qualité humaine rare, de nos jours comme d’hier. Elle a malheureusement manqué à certains d’entre nous à des moments importants de notre histoire. Elle est le ciment indispensable pour une cohabitation paisible entre les hommes.
La plus belle forme de tolérance conçue par l’homme est celle qui a permis aux ennemis d’hier, les adeptes de religions différentes, de vivre en paix sur un même territoire. Pour la distinguer des autres formes de tolérance, certains occidentaux, las des guerres fratricides, lui ont inventé un nouveau mot magique, un écrin, rien que pour elle : laïcité.
Ceci étant, en y réfléchissant de plus près et en analysant le mot « tolérance » avec sérieux et application, en nous prémunissant des effets de toute forme d’émotion et de poésie qui ont un pouvoir monstrueux d’altération de notre capacité de réflexion et de raisonnement, nous y trouvons deux caractéristiques essentielles :
La tolérance est une relation qui se base sur l’existence de deux pôles inégaux : le tolérant et le toléré. D’une part, les deux parties sont définies d’avance et, d’autre part, la relation dépend du bon vouloir du tolérant.
La tolérance est aussi basée sur des règles bien strictes établies par les deux parties et dont les plus importantes sont l’évitement et la non-ingérence mutuels. Le moindre accroc à ces règles la mettrait en péril. Fort de ce constat, je vous propose de faire quelques pas
ensemble dans le monde de la laïcité pleine de tolérance et tenter d’explorer certains de ses recoins avec objectivité et neutralité « laïque ».
À ses débuts, l’émergence de la laïcité était motivée par plusieurs raisons. Parmi elles, celle, quoique discriminatoire n’en demeure pas moins honorable, qui voulait instaurer une égalité entre les hommes indépendamment de leur appartenance religieuse. Discriminatoire, parce qu’à ses débuts, elle ne concernait que des personnes d’une même croyance. Les personnes étaient toutes chrétiennes, de courants différents : catholiques ou protestantes, mais toutes chrétiennes. Tout au plus, il y avait quelques juifs longtemps persécutés par les chrétiens des deux bords et qui ont bien appris la leçon qui sauve la vie, celle qui consiste à bien cultiver l’art de la
discrétion. La laïcité ne concernait pas des peuples ou des communautés ayant réellement des religions hétéroclites qui se basent sur des préceptes aussi disparates les uns les autres. En fait, c’était juste pour trouver un terrain d’entente entre frères turbulents et belliqueux. Même leurs femmes n’étaient d’ailleurs pas concernées, elles ne comptaient pas ou peu en son temps. Elles ne votaient pas et elles n’étaient pas éligibles non plus.
Aujourd’hui, tous les pays de l’occident prétendent être laïcs. La réalité est toute autre. Seule la France peut être considérée comme étant laïque au sens premier du mot qui n’est d’ailleurs plus conforme à la réalité du pays. Tous les autres pays ont une religion prépondérante et reconnaissent une ou deux autres pour lesquelles ils ont aménagé des enclos dans la loi pour qu’elles puissent coexister à l’ombre de la religion patriotique. Ainsi, en Grande-Bretagne, l’Église Anglicane bénéficie de privilèges conséquents par rapport à toutes les autres confessions. Le souverain est le chef de l’Église anglicane. Les pays nordiques, eux privilégient d’autres églises protestantes, les rois et reines ne peuvent pas provenir de n’importe quelle église. Alors que les pays du sud de l’Europe sont plutôt liés au Vatican catholique. La grande majorité des états européens récoltent l’impôt ecclésiastique qui bénéficie à certaines églises, mais pas à toutes. Les constitutions mêmes de ces pays contiennent des listes restrictives des religions reconnues d’utilités publiques et donc bénéficiant de l’argent du contribuable. Ajoutons à cela que lesdites constitutions sont changeantes au gré des
circonstances et que très peu de citoyens sont au courant de ce qu’elles contiennent véritablement. De nos jours, généralement, seuls quelques courants du christianisme et le judaïsme sont reconnus par les états dits laïcs. Mais attention, cette reconnaissance ne vaut pas égalité de traitement. La règle du tolérant et du toléré s’applique pleinement. Vous pouvez observer les jours fériés de chaque pays et vous pouvez conclure avec précision son appartenance religieuse. En Europe, certains, de plus en plus nombreux brandissent, à toute
occasion, la formule creuse de la culture judéo-chrétienne. Pour ceux-là et tous les autres ‘’laïcs’’, que les juifs n’ont pas droit au moindre jour férié n’est en rien choquant. Il ne fallait surtout pas ouvrir la boîte de Pandore, sinon les musulmans s’engouffrent dans la brèche, sans parler des bouddhistes et des hindouistes. On aura alors plus de jours fériés que de jours travaillés me diriez-vous? C’est une éventualité qui est à mon avis peu probable. Parce qu’il suffit de ne pas s’égarer et de garder à l’esprit que la laïcité nous est vendue en tant que facteur de consolidation de l’égalité et du partage. Dans ce cas, la solution serait de répartir le nombre de jours fériés existants entre les confessions selon une règle discutée et acceptée par tous. Le problème, et ce n’est pas le moindre, est que la laïcité étant dans les faits une relation entre tolérant et toléré, elle n’est absolument pas égalitaire. Le tolérant se réserve la part
du lion même si c’est la totalité de la prise. Les petites gens, elles sont de plus en plus nombreuses, confondent, de bonne foi, démocratie, liberté, laïcité et égalité. En réalité, il n’en est rien :
– L’égalité est comme le cordon ombilical, elle disparaît au moment où les gens naissent.
– La laïcité est un leurre d’égalité utilisé au profit d’une religion prépondérante au détriment de toutes les autres.
Historiquement, il fallait peut-être passer par la laïcité pour ouvrir grande la route de la liberté de conscience. Mais en aucun cas, il ne fallait la défendre bec et ongles et ad vitam aeternam. De nos jours, la laïcité est intellectuellement et logiquement une arnaque. Imaginez quelques bandes de malfrats, après quelques années de règlements de comptes et de combats fratricides, pour régner en maître et continuer à commettre leurs forfaits, décident de se partager le territoire, chacun son quartier. Le seul respect de cet accord justifie-t-il en soi sa justesse et sa légalité ? NON et mille fois NON. Sinon, le gouvernement italien n’a aucune raison de combattre la Cosa nostra sicilienne, la Camorra Napolitaine et La ‘Ndrangheta calabraise qui prélèvent le pizzo en se partageant le territoire.
C’est ce que font toutes les religions aujourd’hui à la barbe de tout le monde. Elles sont beaucoup plus fortes que les mafias, elles possèdent toutes des institutions bancaires ou des blanchisseries géantes aux ramifications mondiales.
… Je vous écris en tant que Président du Conseil Représentatif des Institutions Juives de France qui assure la représentation politique
de la plus importante communauté juive d’Europe, et la troisième du monde après Israël et les États-Unis…)
Que dire de ces imams arrogants et incultes financés par des régimes qui n’ont aucune considération ni de la démocratie ni de la laïcité. C’est à se demander où se trouve le fondement de cette soi-disant légitimité politique. Tous ces représentants imposés et désignés
par d’obscures instances sont unis pour remettre la religion au centre de la vie publique des citoyens en imposant, chacun selon sa « foi » (comprenez ses intérêts), des comportements et des conduites passéistes et liberticides révolues. La laïcité ce n’est qu’un pacte du diable entre religions. Bien qu’ennemies, telles des mafias, pour reconquérir l’espace public, elles n’hésitent pas à unir leurs forces contre l’humanisme universel. À ceux qui pensent que la laïcité est porteuse de paix sociale et luttent pour la préserver, à ceux-là, je vais les mettre devant des preuves irréfutables que la laïcité n’est rien d’autre qu’une sorte de ghettoïsation des communautés et
qu’il n’y a rien de plus dangereux et de pire pour un pays, pour une région que la formation de groupes étanches, fermés et tournés vers l’intérieur.
Revenons sur terre et regardons de plus près des situations concrètes de notre quotidien qui sont normalement censées être régies par la laïcité. Prenons l’hypothèse suivante, qui est tout à fait banale et qui n’a rien d’extraordinaire: Une école publique dans un quartier populaire. C’est ce qu’il y a de plus courant, non? Il y a bien des catholiques, des protestants, des juifs, des musulmans, des bouddhistes, des hindouistes et peut-être bien quelques athées qui vivent dans le quartier. Des filles musulmanes viennent aux cours
voilées et refusent de pratiquer le sport avec les garçons ou en leur présence. Pour la natation, elles ont obtenu de certains gérants de piscines un horaire rien que pour elles, elles y vont couvertes de la tête aux pieds. Pendant ces plages horaires, l’espèce masculine y est formellement interdite. Les garçons musulmans, à l’approche du printemps, redoutent et ne supportent pas voir leurs camarades chrétiennes et leurs professeures s’habiller léger. Au retour des vacances, ils ne font pas la bise à leurs camarades filles et pour éviter
de leur serrer la main, ils leur parlent les mains dans les poches. Pour les plus croyants d’entre eux pour ne pas dire les plus extrémistes, sécher les cours devient une sorte de petit Djihad. À la cantine, les élèves juifs et musulmans ne mangent que végétarien alors qu’ils ne le sont pas. Tout simplement, pour les uns, les menus ne sont pas kasher et pour les autres ne sont pas halal. À cause des élèves juifs et probablement de leur représentant le CRIF, il n’y a plus de cours le samedi. C’est shabbat. Les parents des élèves
musulmans revendiquent à leur tour le vendredi, jour de la grande prière. Certains élèves, de toute confession, refusent de suivre les cours de biologie évolutionniste qui mettent en cause la théorie créationniste… Vive la laïcité ou la liberté d’expression et de la pratique religieuse dans le domaine public.
Autre exemple. Une élève, Cassandra, fête son anniversaire. Elle invite ses camarades, manque de pot, elle est d’une famille catholique quoique non pratiquante. Sa mère a préparé quelques plateaux de petits fours, de fromages et de charcuteries, quelques boissons de toutes sortes et un beau gâteau pour l’occasion. Amina, Farida, Hasna, Aziz, Adel ne mangent que halal. Adiva, Élie, Noâ ne mangent que kasher. Ne reste plus que Cassandra l’organisatrice, Roby, Alain et Caroline qui n’ont pas d’interdits à ce niveau. À quatre, ils n’ont de loin pas vidé les plateaux. La maman de Cassandra, naïve, était très déçue, elle pensait que ce n’était pas bon ou que ce n’était pas du goût des jeunes. Mais bon, contre mauvaise fortune, Cassandra fait bon cœur. Elle fait de la place au milieu du salon en poussant les chaises et tout autre objet qui pourraient encombrer la piste de danse. Elle met la musique. Elle invite tout le monde à danser. Amina,
Farida et Hasna sont voilées, elles ont décliné l’invitation. Aziz et Adel regrettaient peut-être la présence des sœurs (filles musulmanes) sinon ils auraient profité pour se rapprocher des roumyas (filles chrétiennes). Finalement, à « contrecœur », ils ont rejoint les sœurs et dans l’espoir de se faire oublier, se sont assis, tête baissée, dans un coin en tripotant leurs portables avec application. Ils ont même refusé de goûter au gâteau sous prétexte qu’il est confectionné avec des graisses animales, sous-entendu graisse de porc. Étant majoritaires, les musulmans et juifs avaient pourri la petite fête à Cassandra. L’année suivante, elle n’a plus invité ni musulmans ni juifs. Et l’étau du communautarisme s’est bien refermé sur ce que l’on croyait être un petit monde et qui s’est bien révélé être des petits mondes.
Un dernier exemple, Zohra, Assia et Lamia, les mamans d’Aziz, de Hasna et d’Amina habitent le quartier depuis leurs arrivées en France, elles se connaissent depuis bien longtemps, elles se sont rencontrées à l’école et au parc en promenant leurs enfants pendant que d’autres promenaient leurs chiens. Elles n’avaient jamais vu cela selon leurs dires. Pour les musulmans, les chiens sont des impurs. Grâce aux enfants et à leurs accents, elles ont aussi sympathisé avec Madame Talia la maman de Noâ, elle parle beaucoup et avec n’importe qui. Madame Sarah la maman de Adiva elle aussi pied-noir, mais dans le genre prétentieuse, en l’absence de mamans juives,
elle salue avec des mimiques, on ne l’entend jamais, elle ne s’attarde pas non plus à rien faire devant l’école. Les mamans asiatiques sont facilement identifiables grâce à leur physique. Elles donnent l’impression qu’elles sont toujours débordées. Toujours en mouvement, elles tournoient telles des guêpes, on ne peut rien leur dire. Quant aux mamans chrétiennes, elles sont reconnaissables à leur accent sec, sans chair, épuré et dénué de tout. Elles ne sont pas déracinées. Telles des plantes endémiques, elles se sentent toujours envahies. Elles ne trimballent pas leurs histoires comme leurs ombres, elles n’en ont pas, elles sont transparentes. Il y a aussi les Martiniquaises,
les Guadeloupéennes et les Portugaises qui, semble-t-il, sont autrement chrétiennes. Elles se rallient généralement aux femmes arabes et autres africaines. Naturellement, tous les jours, des nids de mamans se forment selon les origines et non par affinité personnelle. On donne rarement la chance à l’affinité entre personnes d’origines et de cultures différentes d’éclore. Les gens des quartiers populaires ne roulent pas sur l’or. Le chômage est au plus haut. Alors la culture se résume souvent aux origines et à quelques vagues souvenirs. Les femmes ne travaillent pas et la majorité des hommes non plus. On a beaucoup de temps libre. Souvent, les familles d’origine maghrébine s’invitent les unes chez les autres, histoire de tuer le temps. Les chrétiens s’organisent pour les weekends uniquement, mais pas toujours. Quant aux asiatiques, chômage ou pas, ils travaillent toujours. Ils n’ont pas du temps pour recevoir les voisins. Pour les juifs, c’est un peu plus compliqué, tellement persécutés par les chrétiens durant des siècles, ils ne doivent leur salut qu’à leur discrétion. Ils essayent de copier les chrétiens en tout, ils s’habillent pareil et ils se nomment presque pareil. Ils tentent de se fondre dans le moule extérieur, le moule visible. D’ailleurs, ils ont toujours fait ainsi, partout dans le monde, quand ils étaient chez les
arabes, ils s’habillaient et ils se nommaient de la même façon (des Zitoune, des Ben Guigui, des Elmaleh, des Zemmour, des Zaoui … tous habillés en burnous pardessus des djellabas et fièrement coiffés de fez). À force de vouloir passer inaperçus, ils deviennent méconnaissables. Néanmoins, ils restent intransigeants sur le shabbat le samedi, l’école privée, manger kasher et la synagogue. Au nom de la laïcité, tous ces gens sont dans leurs droits. Tous ces comportements, toutes ces revendications sont légitimes. Vive la laïcité !
Mais pourquoi, bon sang, ils ne se mêlent pas les uns aux autres? De façade si, mais réellement, ce n’est pas qu’ils ne le veulent pas, mais parce qu’ils ne le peuvent pas. À cause de leurs religions respectives, les uns ne mangent que kasher, les autres que halal et les derniers n’ont pas d’interdits. Ils n’ont pas la même histoire non plus. Quant à l’humour, n’en parlons pas. Si vous faites des blagues sur les bougnouls alors que vous n’êtes pas arabes, vous êtes traité de raciste. Si vous faites des blagues sur les juifs alors que vous ne l’êtes pas, vous êtes qualifié d’antisémite. Un moment de convivialité est un moment de partage et de relâchement, si on ne boit pas
tous ensemble une bonne bouteille et si on ne déguste pas ensemble un bon jambon ou un succulent gratin dauphinois ou de bonnes grillades, si les plus vieux ne racontent pas aux plus jeunes des histoires à transmettre aux générations futures, si on ne se gargarise pas ensemble de blagues salaces ou pas, mais qui nous font rire, on ne pourra pas dire qu’on a passé un agréable moment de partage. Comme disait Jean-Marie Bigard: ‘’admettons que…’’ Admettons qu’une fois ou l’autre, une famille musulmane se décide à inviter
leurs voisins chrétiens. Les femmes musulmanes feront tout pour passer le message à la femme chrétienne afin qu’elle s’habille de façon ‘’convenable’’, des vêtements amples et longs, surtout pas de décolleté et si elle consent à mettre sur la tête un joli foulard qu’on lui prête pour l’occasion, elle sera la bienvenue et aura une place dans leurs cœurs comme une sœur musulmane. En définitive, les seuls qui ne posent pas de conditions et par conséquent n’ont pas de problèmes à organiser ou accepter une invitation, ce sont apparemment les chrétiens, ils n’ont pas d’interdits. Ils mangent du couscous, des tajines, des soupes chinoises, du canard laqué et toutes
les spécialités exotiques. Après deux ou trois invitations, on évitera tout de même de les recevoir parce qu’ils ne rendront pas la pareille. Ils sont des mange-tout, ils bouffent même des crapauds. Les juifs et les musulmans ne leur font pas confiance dans la nourriture. Ils feront passer du hallouf pour de l’agneau. Mais attention, bien qu’ouverts, les chrétiens aussi, au début, trouvaient enrichissante cette diversité culturelle. Mais avec le temps, ils ne supportent plus ces modes de vie exotiques selon eux et les jugent envahissants. Alors, il vaut mieux que chaque communauté reste chez soi. De cette manière, il n’y aura pas de problèmes.
Vous allez me dire qu’en restant chacun chez soi, où est le problème ? L’essentiel est de sauvegarder la paix sociale, non ? Malheureusement, cette théorie ne tient même pas un instant. Il est normal que des jeunes et des moins jeunes se mélangent au point de s’aimer parfois me diriezvous? Eh ben, c’est là où tout commence. Les chrétiens et certainement les Asiatiques aussi n’ont pas de lois religieuses qui interviennent de façon stricte dans la vie des couples modernes. Les couples peuvent vivre ensemble autant de temps qu’ils le veulent sans être mariés. Ils ne sont pas obligés d’être de la même religion, ils ne sont pas obligés de se convertir. Tout ceci est parfaitement compatible avec les lois civiles. Chez les juifs et les musulmans, les choses ne peuvent se passer ainsi. Les lois de leurs religions l’emportent sur celles de la république. Tous les chrétiens amoureux de juifs ou de musulmans doivent se convertir s’ils veulent vivre en paix. Vous comprenez, vous, en tant que parent chrétien, vous préférez que votre enfant ne soit pas obligé de se convertir à une autre religion par amour de son conjoint, mais si tel est le cas, vous l’acceptez parce que votre amour pour votre enfant est supérieur à tout. Mais vous, en tant que parent musulman, vous n’allez quand même pas accepter, aujourd’hui comme demain, que l’époux ou
l’épouse de votre enfant ne soit pas de confession musulmane et sunnite de préférence ! Encore moins que votre enfant, fille ou garçon, se convertisse à une autre religion. Votre respect d’Allah et de son prophète est au-dessus de tout. Pour les musulmans, il n’est pas question que les fiancés vivent ensemble hors mariage et qu’ils fassent l’amour avant la nuit de noces. C’est contraire aux lois de l’Islam. Non seulement, ils ne tolèreront pas cette pratique pour leurs enfants, mais ils sont obligés de dénoncer et de médire, ne serait-ce qu’en privé, tous ceux qui le font, qu’ils soient juifs ou chrétiens. Les lois de l’Islam ne s’arrêtent pas aux musulmans. Pour tout
musulman, modéré ou extrémiste, les lois divines sont audessus de tout et tous ceux qui ne les respectent pas sont dans le HARAM (l’illégalité). Vous convenez alors qu’au nom de la laïcité, nous arrivons fatalement à la conclusion où le plus restrictif impose sa loi aux autres permissifs. Boire du vin, même un petit verre à table en mangeant, pour les musulmans c’est de la débauche. Pour un chrétien averti, c’est le sang du christ crucifié. Comment peut-on réconcilier ces trois points de vue ?
Les adeptes des religions qui forment le corps citoyen sont nourris par la justesse de leurs religions-causes respectives qui sont toutes basées sur la disqualification, la diffamation et la haine de toutes les autres. En réalité, demander à un adepte lambda de n’importe quelle religion de respecter les autres, c’est lui demander de renier les fondements mêmes de la sienne et exiger de lui un comportement hypocrite. Historiquement, la laïcité était une excellente solution pour régler la vie des catholiques et des protestants. Ils n’avaient pas de divergences dans les fondements de leur religion commune, ils n’avaient que quelques désaccords sur l’interprétation
de la gouvernance terrestre de celle-ci. Ils lisent les mêmes évangiles et croient tous à Dieu le père, à Jésus et à la Vierge Marie. Dans la vie courante, un protestant et un catholique n’ont pas de différences et par conséquent, pour vivre leur laïcité, ils n’avaient pas besoin d’être hypocrites. L’hypocrisie ne peut durer, elle est aussi une cause importante de l’inimitié, de la haine et de la discorde. La laïcité est un support et un vecteur de choix pour l’hypocrisie.
Aujourd’hui, il est temps de comprendre que la laïcité ne devait être qu’une étape du projet universel de l’humanité et qu’elle a fait son temps. Il est temps de réfléchir à des solutions humanistes durables. Il est temps d’arrêter de nous voiler la face. Il est temps de nous dire la vérité et de la dire à nos enfants. Il est temps d’admettre que les religions sont une pure invention de l’homme pour accroître son royaume en s’appropriant les biens d’autrui. Il est temps de combattre toutes les formes d’ignorance. Les anciennes croyances sont
aujourd’hui qualifiées de mythologies. Les religions actuelles ne sont que mythomanies. Les pacifistes naïfs ne tiendront pas longtemps face à la terreur, face à l’obscurantisme, face à l’asservissement des esprits. Ne vous faites pas prendre dans le traquenard de la liberté de conscience. Ce qu’on vous propose, c’est plutôt la liberté d’inconscience. La laïcité est un terreau fertile pour la liberté d’inconscience de tous, et par conséquent, elle ne garantit nullement la liberté de conscience. Une conscience libre est une conscience au
service de l’humain et libre de toute oppression, sans la moindre entrave. Un libre-penseur, un athée, une conscience libre ne peut en aucun cas cautionner la laïcité. Si vous le faites, vous devenez coupable. Coupable de non-assistance à personne en danger en laissant le champ libre aux escrocs, aux religions spoliatrices du trésor humain, de l’intelligence humaine. C’est abandonner l’espace public à ceux qui vous échangent votre esprit, votre intelligence contre une foi irrationnelle, à ceux qui vous prennent votre lanterne pour
vous confiner dans une nuit éternelle, à ceux qui se murent dans une neutralité confortable.
Je suis intellectuellement né dans un pays chantre de la neutralité. Alors, des méfaits de la neutralité j’en connais un bout comme on dit en Suisse. L’histoire récente de la Suisse fait honte à tout homme. Sous le protectorat de la bonne neutralité, les services de l’État et les autorités d’alors ont collaboré en toute quiétude et impunité avec les nazis. Les biens des juifs étaient confisqués par les nazis et leurs bras droits suisses pour être déposés à jamais dans des banques suisses. Sans l’intervention des États-Unis, ces biens « en
errance », mais bien gardés dans les coffres-forts des grandes banques helvétiques, n’auraient jamais pu être en partie restitués. Être neutre c’est collaborer avec les criminels pour les gains pécuniaires et avec les juges quand on est obligé par la force ou par la loi. À titre d’exemple, si vous acceptez la charte des droits de la personne, vous vous engagez implicitement à la défendre et à lutter contre toute action, tout dogme ou toute théorie qui la mettraient en cause. Les religions qui prônent la supériorité de certains peuples sur d’autres, qui réduisent l’humain à l’esclavage, qui nient l’égalité homme femme en faisant de la femme une propriété de l’homme et qui disposent du libre arbitre de leurs fidèles, non seulement elles devraient être combattues, mais elles devraient être jugées pour crimes contre l’humanité. Se complaire dans une position de neutralité passive et prétendument sage n’est rien d’autre qu’une complicité déguisée avec les criminels. C’est aussi se soustraire au devoir civique de tout citoyen humaniste. Se taire quand un homme, au nom des lois de sa religion, bat sa femme. Se taire quand des missionnaires font le tour du monde pour évangéliser (entendez soumettre) de
force d’autres peuples. Se taire quand au nom d’une religion on instaure des castes pour asservir les uns par les autres. Se taire quand au nom de la religion on chasse des populations pour s’approprier leurs terres. Se taire quand la majorité des pays du monde qu’ils soient démocratiques ou non, civilisés ou non, développés ou non, placent constitutionnellement leurs citoyens sous la coupole de la religion. Se taire et ne pas s’immiscer dans les affaires des autres est bien la règle d’or de la laïcité.
La laïcité est une forme accentuée d’une neutralité lâche et honteuse face à des éléments explosifs et contraires à la raison et aux consciences humaines.
Il n’est non plus pas possible de se déclarer humaniste tout en faisant partie d’une chapelle, tout en faisant un choix de famille, tout en pensant que la sienne est meilleure, qu’elle est supérieure et que les autres ont tort puisqu’ils ont fait un choix différent du leur. Si votre choix d’appartenance à une famille est motivé, alors vos motivations ne peuvent être que racistes, xénophobes et inhumaines. Elles sont alors condamnables. Si par contre, votre choix est motivé juste par facilité et commodité environnementales, alors il n’est pas enraciné
en vous et vous pouvez vous en débarrasser aussi facilement que vous l’aurez adopté. C’est dans cette idée de préférence et d’appartenance, source de discorde et de conflits, que les religions sont toutes semblables. Le sentiment d’appartenance de quelque nature qu’il soit est l’ennemi irréconciliable de l’humanisme. Au mieux, l’appartenance freine l’avancée de l’humanisme.
Refuser de participer à la laïcité et ne pas adhérer à ce système antihumaniste est un acte d’honnêteté et aussi un acte civilisé. Avant nous, certains parmi nos ancêtres ont refusé l’esclavage, ont refusé de participer à des expéditions exterminatrices de leurs semblables. D’autres ont tout simplement refusé de se soumettre à des régimes totalitaires et dictatoriaux… Ici, il vous est demandé simplement d’être cohérents avec vous-mêmes, avec votre logique humaniste, avec vos convictions. Le mal est adjacent au bien, il est telles les mauvaises herbes, elles poussent plus vite que les autres. Si vous relâchez votre vigilance, votre espace vital sera envahi par les voyous et les criminels de tout bord. Mais alors, certains d’entre vous se demandent par quoi doit-on remplacer cette maudite laïcité?
N’ayez crainte, on ne vous demandera pas de mettre l’ouvrage sur le métier et de vous pencher à inventer un nouveau système. Non seulement on n’en a nullement besoin, mais il ne fera pas long feu avant d’être à son tour remis en cause. Par contre, il vous suffit de revenir à l’état naturel de l’homme. Celui de la vraie liberté de conscience.
Être athée c’est l’état naturel de l’homme. L’homme naît libre. Être athée c’est refuser de se soumettre et de faire partie d’un clan, quel qu’il soit.
Pétition contre la loi anti blasphème
Le Code criminel du Canada (article 296) fait du blasphème un crime passible de deux ans de prison ! Dans le contexte actuel de la montée des intégrismes religieux, un tel article risque d’être utilisé contre la liberté d’expression et contre la liberté de critiquer les religions. L’AHQ invite ses membres à signer et à faire circuler la pétition lancée par la Coalition
pour l’abrogation des lois sur le blasphème, dont l’Association humaniste du Québec fait partie, et qui réclame l’abrogation de cet article.
Le député libéral de Willowdale (Toronto), M. Ali Ehsassi, a accepté de porter cette pétition à l’attention du gouvernement canadien. Mais pour cela, il faut au moins 500 signatures d’ici le 20 octobre. Souhaitons qu’il y en ait plusieurs milliers et que les signatures du Québec y fassent bonne figure. On peut lire et signer la pétition à l’adresse suivante : https://petitions.parl.gc.ca/fr/Petition/Details?Petition=e-382logistique suffisante.
Sir John Chilcot
Il n’y a nul besoin de tonitruer que sir John Chilcot est l’humaniste de l’année. Ce fut un haut gradé de la fonction publique britannique, retraité en 1997. Il fut Secrétaire d’État.
Ce qui aura fait son nom pour la postérité est son analyse extrêmement détaillée, très documentée, très sérieuse et sobre, très fournie factuellement, de la débâcle de la guerre d’Irak menée par le tandem BushCheney et leur chien de poche Tony Blair. Il a fait le travail pour lequel il a été généreusement rémunéré…
Le Rapport Chilcot a été déposé en 12 volumes en juillet 2016. Il y conclut que l’argumentaire pour la guerre d’Irak, les armes de destruction massive, fut une fabrication, que le régime irakien de Saddam Hussein ne représentait aucunement une menace aux États-Unis ni à l’Angleterre, que la guerre a été extrêmement précipitée et mal ficelée, somme toute totalement bâclée, qu’elle a ruiné l’Irak, qu’elle a causé des centaines de milliers de morts, qu’elle a enflammé le Proche Orient, qu’elle a grandement amplifié le phénomène du terrorisme islamiste, et qu’elle a aussi causé la mort de centaines de soldats américains et britanniques, faute de logistique suffisante.
Chilcot n’est peut être pas un humaniste, qui sait ?, mais il a un minimum de jugement. Traduisons ses propos en bon français. Les Bush-Cheney furent des génocidaires psychopathes, et Blair leur complice.
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