Rencontrez notre camarade Max Bauchet

par Déc 7, 2013À propos de l'AHQ, Québec humaniste2 commentaires

NDLR Cette page inaugure une série limitée de présentations que nous allons faire de certains membres en règle de l’Association humaniste du Québec. La formule sera toujours la même: on demande à la personne choisie de répondre à quatre questions en mille mots et de fournir au moins une photo. Nos critères de sélection sont très subjectifs. Nous pensons à ceux et celles parmi nos membres qui ont une personnalité unique, qui ont vécu une vie intéressante, qui ont une présence marquée dans notre association. Par déférence et par esprit pratique nous commençons notre série avec un membre plus âgé que la plupart, l’inimitable Max Bauchet. Vous risquez de le rencontrer lors des agapes humanistes alors si vous ne le connaissez pas, regardez bien les photos et profitez des occasions d’échanger avec lui.

Bonjour chers compagnons de l’AHQ, J’avais été autant gêné que surpris d’être le premier sollicité pour cette mini-biographie. Jusqu’à ce que Claude me rassure : je suis le premier parce que je suis le plus vieux ! On a la préséance qu’on peut. Sans doute a-t-il, fort justement, pensé que s’il m’avait donné la parole dans l’ordre du mérite, je serais disparu avant que mon tour n’arrive ! À défaut d’être importante pour autrui, mon existence a au moins le mérite d’être suffisamment originale, différente, pour la rendre peut-être quelque peu intéressante à mes co-humanistes. Ce que j’ai pu répondre à ces quatre questions très générales en plus ou moins mille mots ne peut être qu’excessivement incomplet. Avant chacune de mes réponses, je reprends la question de Claude. 1ère question :

Quelles sont les grandes lignes culturelles, sociales, professionnelles de votre vie ?

Né en 1930 en France. Je sors de l’école hôtelière de Paris à 18 ans. 18 mois de service militaire en Allemagne, puis arrivée au Québec en 1953. En 1955, je traverse le Canada sur le pouce (3 mois), avec quelques détours, et reviens au Québec l’année suivante, après une semaine en vélo-camping pour faire le tour de la péninsule Olympique, dans l’État de Washington,

Impossible de parler de mes 70 emplois différents.

Les principaux : caissier de banque, fonctionnaire fédéral pendant dix ans (Montréal puis Ottawa), à des emplois très divers, puis dans des emplois à temps partiel (pour me consacrer davantage à la philosophie). Mes expériences des activités de pleine nature m’ont amené à œuvrer comme directeur canot-camping de la Fédération québécoise de canot kayak (je rédige le premier guide des rivières canotables du Québec), puis pour les parcs et réserves du Québec, surtout dans le service d’animation, dans les réserves fauniques de La Vérendrye, Mont-Tremblant, des Laurentides, du Mont Orford, de Papineau-Labelle (surintendant par intérim, puis contremaître canot-camping), Mistassini, pour des périodes de durées très diverses, parfois très courtes, ainsi qu’aux bureaux de Québec. Puis pour terminer ma carrière dans les dernières années, comme préposé à l’accueil. Et enfin à ma retraite complète depuis 1994.

2e question : Quels ont été vos intérêts marqués, vos préoccupations majeures, vos militantismes ?

Depuis très longtemps, ma vie se partage entre deux occupations principales : la philosophie, qui m’a mené vers l’humanisme, qui est d’ailleurs une philosophie, en fait que je considère la forme achevée de la philosophie et les activités de pleine nature, plus particulièrement le canot-camping, mais aussi le ski de fond et la raquette. J’ai été le premier président du club de camping de Montréal, puis le président fondateur du premier club de canot-camping au Québec, les Portageurs. À Duhamel, le village auquel est rattaché le lac où j’ai passé une bonne partie de ma vie, je me suis occupé de l’Association des propriétaires du lac Gagnon, et d’ouvrir un réseau de pistes de ski de fond, avec le club Skira. J’ai défini bénévolement le tracé d’un réseau de chemins d’une quarantaine de kilomètres.

Pour l’humanisme, je me suis impliqué très modestement dans l’AQDMD ainsi que tout aussi modestement dans l’AHQVAA par quelques textes tel le dépliant « Êtes-vous un humaniste », mini-conférences, ainsi que la rédaction d’écrits sur l’humanisme dont je parle plus loin, et de quelques articles de journaux, ce qui est somme toute bien peu par comparaison avec d’autres AHQuistes. C’est une raison de plus pour que je ne les oublie pas… Mais c’est surtout par la rédaction d’un traité de l’humanisme, l’Humanisme rationnel, à mi-temps pendant une vingtaine d’années, que j’ai essayé de contribuer à l’humanisme. Je suis très satisfait du résultat, et presque dix ans après l’avoir terminé, je ne vois rien d’essentiel à y changer. Dommage qu’aucun éditeur n’ait partagé ma satisfaction. Mais, pour paraphraser ce que m’a répondu, crûment mais franchement, un éditeur pour un autre livre : « Qui va acheter l’Humanisme rationnel écrit par Max Bauchet ? ». Heureusement, ce travail m’a apporté personnellement beaucoup. Auparavant, j’avais consacré environ quatre années à un autre manuscrit : « l’Avenir de la nation »

3e question : Comment avez-vous cheminé vers l’humanisme et éventuellement vers l’Association humaniste ?

Je suis un philosophe surtout autodidacte. Vers mes 17 ans, une prof de littérature nous ayant parlé de J.-J. Rousseau, cela a éveillé chez moi un intérêt pour la philosophie qui restera pour toujours l’une de mes principales occupations. Pourquoi ? Je n’en sais rien : ni mon milieu familial ni mon milieu social ne m’y avaient préparé.

Je découvris rapidement qu’être autodidacte contraint à beaucoup de travail, mais par contre laisse l’esprit à l’abri du formatage intellectuel des formations académiques. J’abandonne assez vite J.-J. Rousseau, trop pessimiste à mon goût et trop idéaliste : que l’homme soit naturellement bon et que ce soit la société qui le corrompt allait à l’encontre de mes propres perceptions. J’ai eu très tôt, d’instinct, qu’à défaut de toute autre finalité connue, surnaturelle ou autre, notre existence ne pouvait avoir de sens que si nous étions heureux. Mais je suis resté fortement impressionné qu’il ait pu rédiger un livre comme le Contrat social sans n’avoir jamais mis les pieds dans un quelconque établissement scolaire !

Je suis venu à l’humanisme par l’étude de la philosophie. Après avoir été longtemps découragé par la lecture de certains philosophes, je suis tombé, de référence en référence, sur Jean Rostand, puis sur Montaigne et via ce dernier sur les philosophes et autres auteurs grecs et latins. Pour poursuivre mes études et réflexions, j’ai abandonné à 38 ans (au même âge que Montaigne, mais je ne le savais pas alors.) un bon emploi de fonctionnaire pour emménager au bord d’un lac alors relativement sauvage (lac Gagnon, au nord de Duhamel) où j’ai vécu pendant 30 ans sans chemin d’accès autre que le lac, sans électricité, sans eau courante, et pendant longtemps sans télé ni téléphone. J’y ai rédigé les deux manuscrits dont je parle plus haut.

Entre-temps, j’ai entrepris un voyage de sept mois autour du monde, surtout pour mieux comprendre certaines cultures que les livres et les reportages ne m’avaient pas permis de comprendre suffisamment. Surtout : le Japon (10 semaines), l’Inde (dont je me suis rapidement enfui, effrayé), et les kibboutz en Israël, où j’ai travaillé sept semaines.

Depuis ma retraite, fidèle à mes deux intérêts principaux, j’ai rédigé un livre sur le canot-camping, qui a été édité et une Anthologie humaniste des Essais de Montaigne que je cherche présentement à faire éditer. Incidemment, je m’aperçois que c’est la première fois que je suis amené à faire une telle rétrospective, même extrêmement abrégée, de ma vie. Une conclusion globale : aucun regret ! Ce qui est peut-être, à 83 ans, le mieux qu’il est possible d’espérer en ce bas monde.

4e question : Pour vous, à quoi sert l’Association humaniste et quelles sont vos idées pour l’améliorer ou pour la rendre plus intéressante à vos yeux ?

Je ne réussis pas à me souvenir comment j’ai entendu parlé de l’AHQ. Pour moi, l’AHQ est présentement surtout un cercle d’initiés, qui consacrent l’essentiel de leurs activités à se distraire ou à discuter entre eux de ce sur quoi ils sont déjà convaincus et d’accord. C’est un choix légitime, et respectable. Mais je déplore que notre AHQ ne respecte pas davantage l’objectif pourtant exprimé très explicitement dans sa charte, je cite : «. favoriser, développer et promouvoir l’humanisme laïc et la pensée critique, en accomplissant des activités qui sont de nature à contribuer à l’éducation du public, directement ou indirectement, en ce qui a trait au développement de l’humanisme et de la pensée critique ». Je crois que l’AHQ devrait, pourrait, faire beaucoup plus dans ce sens, mais plusieurs courriels, parfois énergiques, à nos présidents étant restés lettres mortes et me sentant trop vieux pour tenter un putsch interne, j’ai décidé de laisser l’action à la génération suivante, et me contenter de continuer à écrivailler.

2 Commentaires

  1. Claudette Lachapelle

    Bravo à Max Bauchet! J’ai connu Max j’avais treize ans. Je faisais du camping avec mes parents. J’ai fait quelques sorties de canot-camping avec le groupe des Portageurs en compagnie de mon mari et avec Max . J’ai maintenant 80 ans et je garde de Max de très beaux souvenirs.

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  2. Pierre Rousseau

    J’ai bien connu Max dans les années 1960 alors qu’avec mon père Roger nous faisions du canot-camping. J’ai même travaillé sous sa supervision au Domaine en 1969 avec Florent Morin et Pierre Laframboise (que Max avait affectueusement surnommé l’ostie de gros calisse – sans accent circonflexe sur le a) sur les nouvelles routes de canot-camping dans ce que nous appelions alors le Parc de La Vérendrye. Ce qui m’a rappelé Max c’est une visite dans une librairie de Granby alors que j’ai feuilleté le Manuel complet du canot-camping. Je suis tombé par hasard sur une photo d’un canot d’écorce et je ne me souvenais pas que Max en avait acheté un. En fait, moi j’en avais acheté un à un aîné, Patrick Maranda, un anichinabé de Kitiganik (Rapid Lake) et, pour mon canot, il avait du chercher une écorce pendant plus d’un mois car il voulait faire un canot de 15 pieds avec une seule écorce comme c’était l’usage dans sa nation. Je me souviens particulièrement de son épouse atikamekw (à l’époque on les appelait les Têtes-de-Boule), une femme très âgée, qui servait d’interprète de temps en temps puisque sa langue coloniale était le français et M. Maranda ne parlait pas cette langue et mon anglais à l’époque était très rudimentaire. Ce canot est rendu dans un musée du canot en Ontario et il ressemble étrangement au canot d’écorce qu’on peut voir à l’aéroport d’Ottawa avec un orignal dessiné sur la proue et qu’on dit avoir appartenu au Premier ministre P.E. Trudeau. J’ai revu Max plus tard alors que nous l’avons visité en avion au lac Gagnon et Max va certainement se souvenir de cette saga s’il est toujours de ce monde car au moment de repartir, l’avion s’est enfoncé entre 2 couches de glace et nous avons dû passer quelques jours chez lui en attendant la fin d’une tempête pour repartir… Il était à l’époque particulièrement intéressé par le concept de nation et il avait commencé à écrire un livre sur ce sujet. Que de beaux souvenirs avec Max!

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