Trois mots du président
Michel Virard
Président de l'AHQ
Michel Virard est un des fondateurs de l’AHQ en 2005 avec Bernard Cloutier et Normand Baillargeon. Ingénieur et entrepreneur, il a également été administrateur des Sceptiques du Québec. il est depuis les tout débuts l’une des âmes dirigeantes de l’AHQ.
Pandémonium
Pandémonium – Depuis sa création en tant que néologisme inventé par le poète anglais John Milton en 1667 dans « Paradis perdu », le terme est utilisé pour désigner un lieu où règnent corruption, chaos et décadence, voire confusion ou vacarme…
La résonnance incongrue entre pandémie et pandémonium est-elle fortuite ? Ou cache-t-elle une subtile mais profonde vérité ? Émergée en plusieurs endroits de la planète, y compris au Canada, des relents de corruption (« scandale de la charité Unis » ?), du chaos (l’armée dans les CHSLD ?) et de la décadence (la ruée sur le papier de toilette ?). Pour la confusion, vous avez pu l’observer avec les contestations des consignes sanitaires. Reste le « vacarme », mais là, la résonance devient dissonance : c’est, au contraire, au spectacle de grandes villes complètement silencieuses que nous avons été conviés. Reste que le score n’est pas négligeable : quatre sur cinq ! Mais ce serait porter des lunettes bien sombres que de ne voir que les aspects négatifs de ce défi colossal que la nature, fatiguée de nos frasques, nous a lancé au visage. Précisément.
En fait, la réaction de nos institutions et de nos concitoyens, sans être parfaite, a été plutôt encourageante : nous ne sommes pas totalement démunis et quand nous avons suffisamment la frousse, nous sommes capables d’élans de solidarité que même les primates les plus intelligents ne peuvent concevoir. On espère seulement que cette (relative) sagesse pourra se manifester sans plus tarder face à la crise climatique.
Comme les autres institutions liées à l’éducation et au spectacle, notre Centre humaniste du Québec s’est retrouvé muet depuis le mois de mars. Cela ne nous a pas empêchés, de peine et de misère, de vous offrir deux ciné-clubs et deux conférences, purement en mode virtuel, durant ces mois de confinement plus ou moins strict. D’autres conférences et films s’en viennent, mais vous comprendrez qu’on navigue à vue : nous ne savons jamais quand, exactement, nous pourrons reprendre les événements au Centre humaniste. Entre-temps, nous améliorons le Centre humaniste (audio, Ethernet, bibliothèque) en nous disant que ça finira bien par servir.
Prenez soin de vous, suivez les consignes, l’AHQ aura besoin de vous pour passer au travers. J’en profite pour remercier ici les
membres qui nous ont fait parvenir de généreux dons ces dernières semaines. Pour ceux que nous n’avons pas encore rejoints, il
est toujours temps de nous donner un coup de main : allez au bas de la page https://assohum.org/nous-contacter/devenez-membre/
(nous remettons des reçus de charité).
Réponse à un correspondant : Quelle est la différence entre athéisme et humanisme ?
Question de sémantique: ne pas croire en une divinité (ou des divinités) n’épuise pas le champ du surnaturel. Il existe une imposante
cohorte de croyances au surnaturel qui ne font pas intervenir une divinité dans la vie des humains. Vous pouvez commencer par
le bouddhisme, par exemple, qui est, strictement parlant, une doctrine athée… mais qui fait appel à un phénomène surnaturel, la
réincarnation (ou métempsycose). Les raëliens, qui se prétendent athées, ont également des croyances, dont celle des « Elohims »,
qui sont en dehors du « naturel », c’est-à-dire de la nature telle que nous la connaissons aujourd’hui.
On nage encore en plein surnaturel, mais au moins la définition de l’athéisme est claire… et limitée : rien de plus que l’absence d’une croyance en une entité (un agent) cause première du cosmos et typiquement interventionniste dans la vie des humains.
Il n’y a rien dans la définition de l’athéisme qui implique une quelconque direction morale, une règle de vie, ni même une façon
précise d’aborder le réel et c’est précisément là où l’humanisme se démarque.
Si vous allez aux définitions d’athéisme et d’humanisme dans un dictionnaire philosophique (le Routledge, par exemple) vous verrez immédiatement que l’athéisme est simplement une « position » sur un point précis de métaphysique. Si vous cherchez humanisme, vous trouverez deux définitions, la première, historiquement, est la définition de l’humanisme de la Renaissance, un courant littéraire qui n’est pas notre propos ici. La seconde définition est celle de l’humanisme moderne : « L’humanisme est un système philosophique cohérent et reconnaissable qui se réclame de progrès substantiels de natures ontologique, épistémologique, anthropologique, éducative, esthétique, éthique et politique ».
Toutefois, pour la plupart des humanistes regroupés dans nos associations, l’essentiel se résume à se préoccuper avant tout de la
façon dont nous acquérons des connaissances (épistémologie, pensée critique) et comment nous devons concrétiser l’empathie que nous ressentons pour nos semblables, y compris ceux à naître. Ce dernier volet nous pousse à intervenir dans plusieurs dossiers nationaux tels que le droit de mourir dans la dignité, la laïcité de l’État, l’éducation (cours ÉCR), l’environnement, et la défense des incroyants ici et dans le monde.
L’athéisme, ou l’agnosticisme, chez les humanistes modernes est le résultat d’une évolution lente au cours des siècles : nos
prédécesseurs sont devenus déistes (ce qui est différent des théistes: les déistes croient en un Dieu créateur qui n’intervient plus après la création) puis athées, à la suite des avancées de la biologie et de la cosmologie.
Donc, pour les humanistes, l’athéisme n’est pas juste le résultat d’un penchant anticlérical (présent quand même, nous le reconnaissons) mais celui de la meilleure compréhension disponible sur l’état du Cosmos. Il s’ensuit que nous considérons les
croyants avant tout comme des victimes d’idées qui ont fait leur temps et, à ce titre, ils ont droit à notre sollicitude, même si nous combattons sans relâche certains concepts religieux, entre autres les notions de « foi » ainsi que de « soumission » et de « destin
». Au contraire, nous agissons pour que les humains se développent en individus autonomes, sceptiques quand c’est nécessaire,
conscients des besoins sociaux des autres et d’eux-mêmes et acteurs de leur vie.
J’espère que ce court texte aura le bonheur de vous éclairer: nous revendiquons l’héritage des Lumières. 🙂
Lettre à madame Chrystia Freeland
Aujourd’hui, nous avons une occasion unique d’investir dans une société améliorée. Une relance verte et juste au Canada signifie
investir, avant tout, dans une société où la santé des citoyens et des écosystèmes prime sur les intérêts des entreprises.
Une relance verte et juste pour le Canada signifie : une transition juste vers une économie sobre en carbone, la protection et
la restauration des écosystèmes terrestres, aquatiques et de la faune, la fin de l’utilisation des plastiques à usage unique et le
développement d’une économie fondée sur la réutilisation maximale, le remplacement des substances toxiques utilisées en
agriculture et dans les produits manufacturés d’usage courant par des choix moins nocifs pour la santé de tous, la création de
milieux de vie en santé et de réseaux structurants de transports collectifs efficaces et accessibles au plus grand nombre.
Je vous prie, Mme Freeland, de considérer que 4 Québécois sur 5 souhaitent une relance verte et que 82 % reconnaissent l’urgence
d’agir pour lutter contre les changements climatiques et protéger l’environnement. La dernière chose que je puisse imaginer, c’est
que votre gouvernement utilise les taxes de ces 82 % de Québécois pour subventionner, directement ou indirectement, l’industrie
des énergies fossiles.
Malgré la grande admiration que j’ai pour vos actions aux Affaires étrangères, votre gouvernement sera jugé sur son action en
matière environnementale. Ce n’est plus l’heure de pelleter les problèmes en avant de nous. Le temps d’une action décisive est
venu et c’est maintenant. Nous comptons sur vous pour réaliser ce changement historique.
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