Évolution de la politique américaine en matière de relations internationales: de l’humanisme à tout son contraire. Dialogue avec Riccardo Petrella

par Jan 18, 2015Articles de fond, humanisme, Québec humaniste, Réflexions0 commentaires

CLAUDE BRAUN

CLAUDE BRAUN

Administrateur et éditeur en chef du "Québec humaniste"

Claude Braun a été professeur de neurosciences cognitives à l'UQAM de nombreuses années. Retraité depuis peu, Il a publié nombres de documents de recherches sur le sujet. Il a été également éditeur du "Québec laïque"  et est depuis quelques années l'éditeur en chef  de notre revue "Québec humaniste" Il a également publié "Québec Athée" en 2010. Téléchargeable gratuitement en utilisant ce lien avec  les compliments de l'auteur.

Les États-Unis d’Amérique ont connu des années de gloire comme fanion international de la justice, de la liberté, de la démocratie, de la coopération, de la générosité, du pacifisme, pendant leur rapide ascension. Cette ascension a atteint son apogée et s’est terminée juste après la 2e guerre mondiale avec le plan Marshall. Depuis lors, dans ses rapports internationaux, on observe un déclin, une inversion, une dégénérescence, de toutes ces grandes qualités. Les ÉUA sont devenus un empire guerrier axé strictement sur son intérêt particulier, promoteur d’injustice, goinfre et pilleur des ressources des autres nations, harceleur et taxeur des autres peuples (bully), contre-modèle des pays et des nations du monde entier [1]. Ce qui suit est une liste de mon cru de la première de ces deux phases de l’histoire des relations internationales des ÉUA, suivie d’une liste des ignominies américaines plus récentes en matière de relations internationales publiée par Riccardo Petrella dans son livre « Désir d’humanisme » [2].

Initiatives glorieuses des États-Unis dans ses relations internationales

  • Au début du 19e siècle, les États-Unis ont soutenu une politique de non engagement dans les guerres d’annexion territoriales des nations européennes. La position idéologique des États-Unis était alors l’anti-impérialisme.
  • Alors que la capacité militaire des États-Unis eut pu lui permettre de saisir plusieurs territoires, elle a eu la civilité de simplement les acheter. Ce fut le cas de la Floride achetée de l’Espagne en 1821 et de l’Alaska acheté de la Russie en 1867.
  • La politique internationale des États-Unis était d’établir des relations commerciales négociées avec les autres nations et d’éviter explicitement et radicalement toute tentative de conquête de territoires par la force. Toutefois, à partir de la deuxième moitié du 19e siècle, ces principes commencèrent à s’effriter. La Californie, l’Arizona et le Nouveau-Mexique furent saisis suite à la guerre avec le Mexique en 1848, ainsi que les Philippines et Puerto Rico suite à la guerre avec l’Espagne en 1898.
  • Une trentaine de pays avaient aboli l’esclavage avant que ne le firent les États-Unis. Ces derniers sont donc loin d’avoir été pionniers en la matière. Mais au moins, lorsqu’ils le firent, pilotés par le président Abraham Lincoln, ce fut fait sans déportations (Emancipation proclamation, 1862). L’esclavagisme était à cette époque établi comme commerce et système économique international fortement intégré.
  • En 1914 les États-Unis complétèrent le canal de Panama. Ce fut un des plus importants projets d’ingénierie de tous les temps et il fut réalisé par entente internationale honorablement négociée (Clayton-Bulwer Treaty).
  • Lors des deux principales guerres « coloniales » d’Europe (les deux guerres mondiales) les États-Unis ont été militairement solidaires des parties agressées. Ils ont ensuite mené des actions concrètes et importantes pour la construction de la démocratie dans les pays sous leur influence (ex : procès de Nuremburg et établissement de conventions éthiques). Finalement, ils ont contribué une aide financière considérable pour la reconstruction de pays défaits autant que victorieux. Le plan Marshall en particulier est universellement reconnu comme le plus magnifique geste de solidarité internationale jamais vu dans l’histoire de l’humanité. Son effet n’a été rien de moins que la restauration de l’Europe en une décennie. • C’est un président américain (Woodrow Wilson) qui a fondé la Ligue des Nations et même s’il y a eu un flottement quant à l’adhésion des États-Unis à la LN suite à une élection, les États-Unis ont joint l’Organisation des Nations Unies (1945) et ont été le plus grand bailleur de fonds et furent aussi très actifs dans tous les dossiers qui prônaient les valeurs humanistes pour les pays membres.
  • De 1914 à 1947 les États-Unis deviennent le donateur le plus généreux et désintéressé du monde en matière d’aide financière pour le secours aux peuples affamés de la planète (Relief of Belgium (CRB), 1914, U.S. Food Administration, 1917, American Relief Administration. 1921-1923, LendLease Act, 1941, United Nations Relief and Rehabilitation Administration (UNRRA), 1943-1946). Mais à partir de la doctrine Truman (1947), toute aide internationale devint centrée sur le but de contenir le communisme et après la chute de l’URSS, l’aide internationale donnée par les États-Unis per capita se fit dépasser par plusieurs douzaines de pays.

Opposition des États-Unis à un système mondial de régulation politique et de welfare fondé sur la pluralité et des mécanismes démocratiques (extrait de Désir d’humanité, Le droit de rêver, de Ricardo Petrella)

  • Refus de ratifier la convention internationale interdisant la production, la diffusion et la vente des mines antipersonnel (1998).
  • Refus de signer la Convention de Rome prévoyant la possibilité de sanctions judiciaires, par une Cour pénale internationale permanente, dans les cas de génocides, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre (1998). Les États-Unis s’opposent à la création de la Cour pénale internationale; celle-ci entre malgré cela en fonction en 2003, les États-Unis ayant obtenu, sur une base temporaire, l’immunité pour leurs ressortissants.
  • Annulation unilatérale du Protocole de Kyoto prévoyant la réduction graduelle et le contrôle international des émissions de CO2 dans l’atmosphère (2001).
  • Refus de signer la convention proposée par l’OCDE sur le contrôle et la suppression graduelle des paradis fiscaux (2001 ).
  • Annulation unilatérale du traité de contrôle et de limitation des missiles balistiques intercontinentaux (traité ABM) signé en mai 1972 par les États-Unis et l’URSS (2001 ).
  • Refus de signer la déclaration, approuvée à l’unanimité par tous les États participants à la Conférence des Nations Unies à Vienne en 1993, établissant la reconnaissance des droits économiques et sociaux parmi les droits de l’homme (2002).
  • Refus de signer le protocole additionnel à la Convention sur l’interdiction des armes biologiques (CIAB) ratifiée par 143 pays (2002).
  • Refus de la libéralisation des prix des produits pharmaceutiques dans le cadre de I’OMC (2003).
  • Opposition systématique, dans le cadre de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies, à l’adoption de mesures destinées à concrétiser les droits économiques, sociaux et culturels.

Références

  1. Un sondage de la BBC de 28,000 personnes dans 27 pays révèle que 51% des répondants avaient une opinion défavorable des États-Unis tandis que 48% avaient une telle opinion de la Corée du Nord. Source : http:// electronicintifada.net/content/israel-iran-us-leastliked-countries/6793
  2. Petrella, Riccardo, (2004). Désir d’humanité : Le droit de rêver. Montréal : Écosoci

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