Le problème avec les religions politiques: réflexion humaniste sur les religions, les guerres et les conflits géopolitiques
Rodrigue Tremblay
Rodrigue Tremblay est professeur émérite d’économie à l’Université de Montréal.
Ex ministre du Parti Québécois, économiste et membre de l’Association humaniste du Québec. Il est l’auteur des livres « Le nouvel empire américain », « Le Code pour une éthique globale », de même que son dernier publié aux Éditions Fides et intitulé « La régression tranquille du Québec, 1980-2018 ».
On peut le contacter à l’adresse suivante :rodrigue.tremblay1@gmail.com.
« La religion diabolise la science, se fait complice de l’ignorance et de l’obscurantisme. Source de haine, de tyrannie et de guerres, la religion met notre monde en danger. » Christopher Hitchens (1949-2011) auteur britano-américain, (auteur de « God Is Not Great: How Religion Poisons Everything », 2007)
La religion est considérée par les gens ordinaires comme vraie, par les sages comme fausse, et par les dirigeants comme utile. » Sénèque le Jeune (c. 3 BC – 65 AD) Philosophe romain
« Je dis tout à fait délibérément que la religion chrétienne, telle qu’elle est organisée dans ses églises, a été et est toujours l’ennemi principal du progrès moral dans le monde. » Bertrand Russell (1872–1970) Prix Nobel de Littérature (1950), auteur de « Why I am not a Christian », 1927)
« Je pense qu’à tout prendre l’influence morale de la religion a été terrible. Avec ou sans religion, les bonnes gens peuvent bien se comporter et les mauvaises gens peuvent faire le mal. Mais, pour que des personnes bien fassent le mal, cela exige l’influence de la religion. » Steven Weinberg (1933- ) Prix Nobel de Physique, (« Facing Up », 2001)
Les fous les plus dangereux sont ceux créés par la religion, et … ceux dont c’est le but de perturber la société savent toujours comment en faire bon usage à l’occasion. » Denis Diderot (1713-1784) Philosophe français et encyclopédiste, auteur de L’Encyclopédie, 1751-1772), (Conversations avec une dame chrétienne, 1777)
Introduction
Le monde a un problème présentement avec les religions politiques. Elles sont une source de perturbations, de troubles, de terrorisme, de persécutions, de massacres, de conflits insolubles et de reculs de civilisation. Leurs codes moraux sont dépassés et remplis de contradictions.
Quand une religion est avant tout éthique et personnelle, comme c’est surtout le cas avec les religions orientales, tel le confucianisme, le bouddhisme, le taôisme, le zoroastrisme, etc., il y a peu à redire parce que cela relève d’un choix personnel. Des personnes peuvent y trouver une identité, du réconfort, de la spiritualité et même un guide de vie. L’accent y est alors mis sur l’excellence individuelle et le développement humain dans la recherche du plus grand bien des individus et de la société idéale, sans s’en remettre à des dieux abstraits et anthropomorphiques qui prennent parti et qui se vengent.
Mais quand une religion organisée et structurée, avec ses dogmes absolus et totalitaires, se donne une mission prosélyte et politique, comme c’est le cas avec les versions les plus extrêmes du judaïsme, du christianisme et de l’islamisme — les trois religions abrahamiques — cela concerne l’ensemble de l’humanité. L’histoire enseigne que lorsque de telles religions politiques extrémistes s’emparent du pouvoir, le premier geste de leurs dirigeants est d’abolir toute une série de libertés et de droits fondamentaux: liberté de pensée, liberté d’opinion, liberté d’expression, liberté de conscience, liberté de culte, liberté démocratique d’élire le gouvernement, liberté de la presse, liberté d’association et liberté de réunion pacifique. C’est l’avènement du totalitarisme religieux et de l’esclavage de la pensée. Cela n’est pas peu dire.
Un peu d’histoire: Les politiciens anciens et les religions politiques
Ce qui rend les religions extrémistes d’essence politique dangereuses, c’est leur tendance à s’associer aux éléments les plus réactionnaires d’une société et de partager avec eux un pouvoir oppressif contre le peuple, que ce soit le pouvoir militaire ou le pouvoir autocratique. Les régimes théocratiques et les empires dictatoriaux et les royautés totalitaires ont été de cette nature tout au long de l’histoire.
En effet, de tous temps, les dirigeants anti-démocratiques ont trouvé dans les religions établies des alliés sûrs et des instruments commodes pour assoir leur légitimité et leur autorité sur les populations. En contrepartie, les leaders religieux ont voulu généralement voir désigner leur culte religion officielle d’un pays ou d’un empire avec tous les privilèges et les prérogatives qu’un tel monopole peut conférer à ceux qui en jouissent.
Ainsi, quand l’Empire romain était déjà en déclin, au début du IVe siècle de notre ère, l’empereur Constantin (272-337) pensa faire un bon coup quand il s’associa au mouvement christianiste ascendant, même si au début ce dernier était un mouvement pacifiste qui cadrait mal avec un empire militaire en guerre perpétuelle.
En l’an 313, en effet, Constantin entreprit de consolider l’unité de son empire en plaçant le Dieu chrétien au-dessus de son rôle d’Empereur à l’instar du dieu romain précédent Sol Invictus (Soleil invaincu), consacrant ainsi l’alliance entre le pouvoir impérial et le nouveau pouvoir religieux.
L’échange de bons procédés consista alors pour l’Église chrétienne du temps à considérer l’empereur romain comme ‘désigné par Dieu’, le soutirant ainsi au contrôle et au besoin, à la colère du peuple, tandis que l’empereur accordait à la religion nouvellement favorite divers privilèges et une exclusivité de contrôle sur les personnes. Constantin alla même jusqu’à organiser lui-même, en 325, le premier concile de Nicée, considéré comme le premier concile œcuménique du christianisme. C’est ainsi que la religion chrétienne, d’illicite qu’elle avait été pendant trois siècles, devint un rouage fonctionnel de l’État impérial romain et l’une de ses principales assises, avec l’armée, de son pouvoir.
Pendant presque quinze cents ans, c’est-à-dire jusqu’à la Révolution française de 1789, laquelle proclama que le pouvoir politique venait du peuple et non pas de déités abstraites, ce sera le précédent auquel les rois et les empereurs européens auront recours pour assoir leur autorité absolue sur les peuples et justifier leur légitimité non démocratique.
En 392, l’empereur Théodose Ier (347-395) franchit un pas décisif et décréta que le christianisme allait devenir la seule religion officielle de l’empire romain tandis que les autres religions étaient formellement interdites. Le christianisme d’État était né, et la fusion entre le pouvoir impérial romain et le pouvoir chrétien était complétée. Cet empereur en profite aussi pour abolir les Jeux olympiques, en partie à cause de la nudité du corps des compétiteurs, le culte du corps et la nudité étant dénigrés par le christianisme. Pour clore le tout, l’Église chrétienne plaça les deux empereurs romains Constantin et Théodose Ier dans son catalogue des saints.
Malheureusement pour l’empire romain, sa fusion avec la hiérarchie chrétienne fut suivie de multiples invasions et pillages barbares (l’empire romain d’Occident cessera même d’exister à partir de l’an 476), et elle donna suite à une période de chaos, de dislocation et de guerres, une des plus sombres de l’histoire européenne, que l’on désigne sous le vocable d’Âge des Ténèbres, laquelle perdura pendant 600 ans, soit jusqu’aux environs de l’an 1000.
Les penchants religieux extrémistes de certains politiciens canadiens et les menaces à la démocratie
Quand un ‘born-again’ évangélique comme Stephen Harper, copiant en cela un George W. Bush ‘born-again’ aux États-Unis, et un membre de la secte évangélique ‘Christian & Missionary Alliance’, consacre $5 millions de fonds publics à la création d’un “Bureau de la liberté religieuse” (avec ambassadeur, bureau et budget) pour faire jouer au gouvernement canadien un rôle de théologien à travers le monde, il le fait peut-être parce qu’il croit qu’il y a de ‘bonnes’ et de ‘mauvaises’ religions, mais il le fait aussi pour s’attirer les faveurs politiques, électorales et médiatiques de certains électeurs et bailleurs de fonds férus de guerres de religion, notamment au Moyen-Orient.
Côté religion, peu de Canadiens savent que leur Premier ministre est, comme George W. Bush, un adepte d’une secte évangélique. Plusieurs de ses députés conservateurs de l’Ouest canadien sont de la même mouture. Un livre de Marci McDonald (The Armageddon Factor: The Rise of Christian Nationalism in Canada) décrit bien le phénomène. L’influence de certains pasteurs évangéliques sur des décisions du gouvernement Harper, allant même jusqu’à influencer des projets de loi, a été bien documentée dans un article de Hélène Buzzetti dans l’édition du journal Le Devoir du 7 avril 2011 et intitulé « Des fous de Dieu chez les conservateurs ». On y apprend, entre autres révélations délirantes, que plusieurs députés conservateurs rejettent la théorie de l’évolution des espèces parce que contraire à leur religion. On se croirait au temps de Galilée quand ce dernier fut condamné par l’Église catholique, le 22 juin 1633, parce qu’il avait découvert que la Terre tournait autour du Soleil, ce qui contredisait les textes religieux supposément infaillibles !
Mais la politique partisane s’en mêle aussi. Quand le ‘bornagain’ Stephen Harper a créé son bureau religieux à Ottawa, à toute fin pratique, seuls les journaux anglophones de la plus grande chaîne canadienne de journaux, fondée par Izzy Asper (appelée autrefois Canwest et aujourd’hui Postmedia Network), et possédant, entre autres, le National Post de Toronto, l’Ottawa Citizen, le Montreal Gazette, le Windsor Star, le Calgary Herald, le Edmonton Journal et le Vancouver Sun) appuyèrent cette incursion du gouvernement Harper dans la politique religieuse internationale. Il ne faut pas se surprendre. Les épanchements religieux extrémistes de Harper le porte à accorder un soutien aveugle à l’état d’Israël. La secte à laquelle il appartient prétend, en effet, un retour imminent de Jésus-Christ sur terre, et l’état hébreu est au centre de ce genre d’élucubrations. Ainsi donc, les calculs électoraux ne sont jamais bien loin dans les effusions religieuses de certains politiciens aux idées délirantes. Celles-ci, cependant, ont des conséquences concrètes sur les politiques qu’adopte le gouvernement Harper en notre nom.
Très souvent, cependant, quand des religieux extrémistes s’insèrent en politique, ils se prévalent de la liberté qui est garantie dans nos régimes démocratiques, en vertu de nos principes et de nos constitutions, mais lorsqu’ils obtiennent une majorité dans quelque pays que ce soit, ces mêmes personnes n’hésitent point à abolir les libertés démocratiques, en vertu de leurs propres principes religieux.
L’histoire et l’expérience contemporaine nous enseignent, en effet, que lorsqu’une religion politique organisée, comme l’islam, contrôle une majorité de la population dans un pays donné, il est pratiquement impossible que la démocratie puisse y survivre ou s’y implanter. Il n’y a, en pratique, aucun pays à majorité musulmane qui soit une véritable démocratie. C’est que la démocratie ne peut fonctionner avec des gens qui ne croient pas en elle par idéologie religieuse. En fait, on ne peut utiliser la religion, quelle qu’elle soit, pour faire de la politique sans mettre en péril la démocratie et la stabilité sociale.
Les religions politiques les plus extrémistes sont, par essence, hostiles à la démocratie et au principe que les gouvernements ne sont redevables qu’au peuple et non aux théocrates qui prétendent parler au nom de divinités abstraites. Dans les pays où une religion politique domine, en effet, les compromis sont difficiles sinon impossibles. Ce que les extrémistes religieux recherchent, ce n’est pas la démocratie mais le pouvoir absolu. Assez rapidement, le tout bascule vers une dictature larvée, sinon vers une dictature théocratique, comme c’est le cas aujourd’hui en Iran et en Arabie saoudite.
Les religions politiques: instruments de torture et de guerre dans l’histoire
Personne ne peut contester que les religions politiques aient été des instruments de torture intellectuelle et physique et de guerre dans l’histoire humaine. C’est un fait historique incontestable. Leurs livres “saints” incitent ouvertement à tuer, à mutiler et à anéantir les “infidèles”, c’est-à-dire tous ceux et celles qui s’opposent à leurs projets de conquête et d’asservissement.
En général, quand des individus ont plus de loyauté à leur religion qu’à leur pays, c’est le début d’une désintégration sociale et politique avec des conséquences à long terme qui ne peuvent qu’être néfastes.
Remarquez bien, quelque chose s’y approchant a prévalu dans la chrétienté après le 4ème siècle, quand l’Église et le Trône ont formé d’étroites alliances, le clergé confirmant le pouvoir des rois et des empereurs, et l’aristocratie riche et puissante protégeant la hiérarchie religieuse, elle aussi riche et puissante. C’est seulement avec l’avènement de la Renaissance que l’Europe chrétienne a commencé à s’accommoder de la démocratie comme forme la plus humaniste de gouvernement.
Et quand une telle intransigeance est codifiée dans des livres sectaires que certains considèrent “saints”, on n’est pas loin en effet de la folie collective. En effet, les extrémistes de toutes les religions peuvent trouver des passages dans leurs livres saints qui encouragent la violence contre les autres. Les contradictions abondent. Qu’il suffise de dire que ces extrémistes négligent d’autres enseignements de leur livre saint au sujet de la paix, de la justice, de la bonté, de la courtoisie et de la compassion envers les autres, pour se concentrer sur des admonitions qui appellent à l’intolérance, à l’agression et au meurtre contre les supposés infidèles.
Il n’est pas étonnant que les chefs terroristes usent du masque de la religion pour diaboliser leurs ennemis et pour revêtir leurs cruautés et leurs atrocités d’une pieuse justification. On terrorise et on tue au nom de Dieu ou d’Allah. La couverture de la religion pour justifier le terrorisme, particulièrement le terrorisme suicidaire, et le massacre d’innocents, a aussi l’avantage de faciliter le recrutement des soi-disant martyrs et des fanatiques, sinon des individus tout à fait dérangés, qui ne seraient pas aussi facilement mobilisés pour une cause étroitement politique. Ce peut être une raison pour laquelle le terrorisme d’aujourd’hui basé sur la religion est plus meurtrier et plus dévastateur que le terrorisme reposant avant tout sur le nationalisme politique d’il y a cinquante ou soixante ans, lors des soulèvements de libération nationale. Avec les religions politiques les plus extrémistes, c’est un nouveau barbarisme qui se déchaîne sur le monde.
Les religions politiques extrémistes et les conflits qui perdurent
Le mélange de la religion et de la politique est explosif. Il l’a été de tous temps et il l’est encore aujourd’hui. Cet amalgame fausse le jugement et mène à des folies collectives. Comme l’a bien dit Voltaire (1694-1778), « ceux qui peuvent vous faire croire à des absurdités peuvent vous faire commettre des atrocités ».
En effet, l’intransigeance qui repose sur des mythes religieux est sans doute une cause principale de conflits latents entre les êtres humains. Une telle intransigeance, lorsqu’elle s’appuie sur des convictions religieuses absolutistes ou sur des élucubrations délirantes, ne laisse en pratique aucune place aux compromis et à la réconciliation. Tout est noir ou tout est blanc. Il n’y a pas de juste milieu.
Toutes les religions prosélytes telles que l’islam et le christianisme, ou ethnocentriques telle que le judaïsme, tendent à mélanger la politique et la religion parce que l’un de leurs objectifs est de contrôler comment les gens pensent et se comportent. Le contrôle des esprits, voilà l’objectif ultime.
Sur ces points, je dirais que l’islam (soumission ou reddition, en arabe) ne s’en tire pas bien, en général, parce qu’il s’agit d’une religion politique qui tend à institutionnaliser une symbiose entre la politique et la religion. C’est une religion qui tend, au moins théoriquement, à concentrer l’autorité temporelle et spirituelle dans une seule entité. Structurellement, dans l’islam, le Calife religieux et le Cheikh politique sont censés être la même personne, exerçant des pouvoirs spirituels et politiques sur le peuple.
C’est pourquoi, beaucoup de conflits entre les humains ont comme toile de fond des religions politiques. Ce n’est pas parce que les grandes religions politiques ont proposé de meilleures philosophies et de meilleurs codes moraux qu’elles se sont imposées dans de nombreux pays. Ce fut plutôt par le recours aux armes et aux guerres que ce fut fait. La supériorité des armements a joué un rôle beaucoup plus grand que les idées dans l’érection d’empires religieux.
Officiellement, la dernière guerre de religion s’est produite en Europe de 1618 à 1648, opposant des rois catholiques et des rois protestants. Ce fut la guerre de Trente ans (1618-1648). Elle prit fin avec la Paix de Westphalie, un traité qui posa les balises de paix que l’on retrouve dans la Charte des Nations Unies de 1945.
Mais auparavant, il y avait eu les fameuses Croisades du Moyen Âge, une série de pèlerinages armés, récompensés par des Indulgences et prêchés par le pape. Celles-ci opposaient le monde chrétien et le monde musulman et tournaient autour de la question de savoir qui allait contrôler la Terre sainte.
Les premières Croisades (1095-1291) eurent comme objectif militaire de réoccuper une partie des terres perdues lors de l’expansion arabe du IXe Siècle, et ainsi que de rendre la ville de Jérusalem accessible au pèlerinage chrétien. Les Croisades se muèrent finalement en expéditions contre les “hérétiques” qui menaçaient le pouvoir politique du pape. Ainsi, la croisade des Albigeois (1208-1229) (ou croisade contre les Albigeois) est une croisade proclamée par le Pape Innocent III contre l’hérésie du catharisme, concentrée dans le Sud de la France. C’est à cette occasion que le représentant dominicain du Pape, Arnaud Amaury, déclara en 1209 au général en charge des armées chrétiennes qui se demandait comment distinguer les chrétiens des albigeois dans la ville de Béziers: “Tuez-les tous. Dieu reconnaîtra les siens!”
Toutes ces guerres sur fond de religion avaient été précédées par les conquêtes militaires musulmanes. En effet, l’histoire de l’expansion de l’islam, avec ses concepts de califat, d’oumma, de dâr al-harb et dâr al-islam, passe à travers les conquêtes militaires. De l’Arabie, en passant par l’Iran, jusqu’en Afrique, c’est l’épée qui a servi de soutien au colonialisme islamique religieux. Après la conquête de La Mecque par les musulmans en 630, et malgré le fait que l’islam comme tel se scinda en plusieurs branches dès la mort de son Prophète en 632 (sunnisme, chiisme, kharidjisme), c’est une dynastie de califes armés, les Omeyyades, qui gouvernèrent le monde musulman à compter de 661. Cet empire musulman s’étendit alors de l’Indus jusqu’à la péninsule Ibérique. Et on sait que ce ne sera qu’en 1492 que l’Espagne de la royauté catholique de Ferdinand et d’Isabelle se débarrassera par les armes de la tutelle musulmane, l’obscurantisme chrétien remplaçant alors l’obscurantisme musulman.
Aujourd’hui encore, au vingt-et-unième siècle, on retrouve ce même conflit entre l’islam, d’une part, et le judaïsme et la chrétienté, d’autre part, surtout depuis la création de l’état d’Israël en 1948. Les guerres à répétition au Moyen Orient sont à la fois des guerres de religion, des guerres territoriales et des guerres pour le pétrole de la région. Aux États-Unis, outre les néoconservateurs pro Israël, les principaux propagandistes des guerres au Moyen Orient sont les sectes évangéliques.
En dépit des leçons de l’histoire, des politiciens incompétents et/ou corrompus et/ou ignorants ont depuis quarante ans dans les pays occidentaux ouvert les portes à une immigration islamique massive et non ciblée, laquelle est très difficile à intégrer socialement, culturellement et économiquement.
En effet, il existe une incompatibilité structurelle entre l’islamisme et la laïcité humaniste et démocratique, essentiellement parce que l’islam est un système politique envahissant et totalitaire, avant d’être une religion. C’est le cas, entre autres, de tous ces regroupements fondamentalistes dans les pays occidentaux qui sont dominés et subventionnés par le wahhabisme saoudien et d’autres courants dits salafistes. Ne nous méprenons point sur les sources de financement de toutes ces mosquées et madrassas qui poussent en territoire européen et nord-américain. Un tel envahissement extérieur est une menace directe à la civilisation occidentale.
Comment les générations futures composeront avec cet héritage empoissonné qui menace les fondements mêmes de la civilisation occidentale reste à voir. Tôt ou tard, la marmite expérimentale des politiciens et des bien-pensants fondés sur le multiculturalisme sautera en Europe et en Amérique du nord.
Un exemple contemporain: les visées religieuses dans le conflit israélo-palestinien
Prenons comme exemple le fameux mythe juif qui consiste à vénérer un livre qui proclame la supériorité d’un peuple sur tous les autres. Un tel mythe est à l’origine de multiples dérives à travers l’histoire et sert encore de toile de fond au sempiternel conflit qui oppose l’état hébreu au peuple palestinien depuis plus de soixante ans.
On n’a qu’à commencer avec la Bible que le Judaïsme et le Christianisme utilisent encore comme guide moral. La Torah judaïque, soit les cinq premiers livres de l’Ancien Testament (Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, et Deutéronome) avec ses 613 commandements et enseignements, de même que le Talmud dont il représente le versant oral, sont des références qui ont servi de tous temps de charte historique, mythique et doctrinale au peuple juif.
Ces textes contiennent cependant des passages et des interprétations qui ne sont pas loin d’être des incitations à la haine raciale et à la violence, certains rabbins orthodoxes s’y référant même à l’occasion pour appeler les Juifs au meurtre des non-Juifs. Par exemple, l’Association des rabbins pour le peuple et territoire israélien émit une directive religieuse selon laquelle la Torah permettait le bombardement et l’extermination des populations palestiniennes, justifiant ainsi à l’avance les bombardements israéliens de la bande de Gaza à la fin de 2008. (“During time of war: Enemy has no innocents”, Jerusalem Post, July 12, 2006)
Partant du postulat commode qu’ils sont, de tous les peuples, celui qu’un dieu abstrait et inexistant appelé Yahvé aurait “choisi”, on présume comme favori, certains Israéliens d’aujourd’hui s’accordent des droits qu’ils refusent aux autres, notamment les Palestiniens qui vivent sur le même territoire qu’eux. Ils se réfèrent au fameux passage de leur livre saint, la Torah que les chrétiens appellent la Bible (Ancien Testament):
Car tu es un peuple saint les Israélites, consacré à l’Éternel ton Dieu ; l’Éternel ton Dieu t’a choisi, afin que tu sois pour lui, un peuple qui lui appartienne en propre, d’entre tous les peuples qui sont sur la face de la terre ». — (Deutéronome 7:6).
Cet extrémisme judaïque rencontre l’extrémisme islamique : « Les musulmans doivent éduquer leurs enfants au Jihad. C’est le plus grand avantage de la situation : instruire les enfants au Jihad et à la haine des juifs, des chrétiens, et des infidèles ; éduquer les enfants au Jihad et à la renaissance des braises du Jihad dans leurs âmes. C’est ce qui est nécessaire maintenant » Cheikh Mohamed Saleh Al Munajjid, un imam d’Arabie Saoudite.
Ou encore: “Nous appelons chaque musulman qui croit en Allah (Dieu) à tuer les Américains et à piller leurs richesses, où que ce soit, dès que possible.” Oussama Ben Laden, 1998.
Quand des populations font reposer leur vision du monde sur de telles élucubrations, lesquelles ne sont pas loin d’être des hallucinations collectives, les conflits deviennent insolubles. Une pérennité de conflits en découle.
Le message historique est donc clair : si l’humanité, et surtout l’Occident et l’Europe, n’ont pas la sagesse ou le pouvoir de se libérer du carcan moral dépassé des religions politiques, ils rencontreront, au cours des prochains siècles, des difficultés croissantes dans ce monde de plus en plus globalisé. En effet, les religions politiques ont peu ou rien à dire pour éviter les guerres meurtrières. Au contraire, quand elles ne les encouragent pas ou ne les attisent pas ouvertement, elles s’en accommodent fort bien.
Les persécutions religieuses et les atteintes à la liberté
Les religions extrémistes politisées sont un fléau humanitaire. Elles sont une menace constante à la démocratie et aux droits humains fondamentaux partout où elles s’implantent et prennent le pouvoir. Elles sont, en particulier, des instruments d’assujettissement des femmes en les traitant systématiquement en inférieures.
Elles sont coupables d’innombrables actes de violence au cours de l’histoire. Elles ont créé l’Inquisition et l’excommunication catholiques et les fatwas, les jihads (guerres saintes et génocides) et la Charia islamique pour imposer la discrimination, pour ostraciser, pour opprimer, pour persécuter et pour violenter les personnes en fonction de leurs croyances ou de leurs non croyances religieuses, quand ce n’est point en fonction de leur sexe. Si la raison et la logique dictaient vraiment nos positions, il y a longtemps que ces religions totalitaires auraient été décrétées hostiles à la démocratie et à la liberté.
Il faut se rappeler que dans le passé, l’excommunication catholique était, en pratique, une condamnation à mort puisque la victime perdait tous ses droits fondamentaux. L’Inquisition catholique ne fut en fait qu’une extension du châtiment de l’excommunication.
Pendant plus de six cent ans, en effet, l’Église catholique a poursuivi en Europe une politique de persécution systématique des personnes qui mettaient en doute son autorité absolue sur les esprits. C’est ainsi que pendant des siècles, l’Inquisition catholique a été responsable de la mort de milliers de personnes dont le seul crime fut celui d’avoir suivi leur conscience et d’avoir été fidèles à leurs convictions personnelles. Certains savants, comme Galilée, n’échappèrent à sa vindicte qu’en s’excusant du bout des lèvres pour leurs découvertes scientifiques. La tyrannie religieuse était omniprésente.
Alors que l’Inquisition catholique a pris fin au début du dix-neuf siècles et est un mauvais souvenir, l’islamisme semble, par contre, avoir pris la relève. En effet, la dérive islamiste sert encore à opprimer des populations entières et elle demeure de nos jours la principale source de terrorisme aveugle dans le monde.
Les textes de son livre “saint”, le Qur’an (Coran), et de ses Hadiths, sont remplis d’appels à la haine et à la violence que certains récusent mais que d’autres esprits faibles prennent pour des incitations à faire le mal. Ces extrémistes sont contre la liberté de pensée, contre la liberté de conscience et contre la liberté de parole. Ils s’opposent aux droits des femmes. Ce qu’ils recherchent de tous temps, c’est l’esclavage des personnes pour assoir leur pouvoir totalitaire. Il est donc vrai que la liberté est toujours à reconquérir parce que les tyrans et les désaxés sont toujours à l’affût de la brimer.
Par exemple, dans le Qur’an (Coran), un Allah cruel et impitoyable ordonne aux musulmans de terroriser les non musulmans : « Combattez-les (les non musulmans). Allah, par vos mains, les châtiera, les couvrira d’ignominie, vous donnera la victoire sur eux et guérira les poitrines d’un peuple. » (Sourate 9:14)
Ou encore: « Je vais jeter l’effroi dans les cœurs des mécréants (non musulmans). Frappez donc au-dessus des cous et coupez le bout de leurs doigts…. —Ce n’est pas vous qui les avez tués : mais c’est Allah qui les a tués. » (Sourate 8:12, 17)
Si de tels livres délirants étaient publiés aujourd’hui, ils seraient sans doute condamnés pour incitation à la haine raciale et au meurtre. Néanmoins, certaines personnes s’y réfèrent encore et croient intégralement à chaque mot qu’on y trouve, sans doute sans trop réfléchir sur la portée des incitations à la violence et au meurtre que de tels livres, dits saints, contiennent.
Conclusion : Les religions extrémistes dans les sociétés démocratiques et pluralistes
Puisque notre perspective sur le monde influence comment nous nous comportons face aux autres, on doit évaluer tout code moral, d’où qu’il vienne, à partir de la façon dont ses adhérents traitent les autres et si oui ou non son application améliore la vie des gens. Si ceux qui le suivent ont peu de regard pour les autres, et si leurs valeurs morales finissent par abaisser la qualité de vie d’autrui, on est en présence d’un mauvais code moral ; si, par contre, ceux qui y adhèrent ont de la considération et de la compassion pour les autres, les traitent avec dignité et respect, et que cela résulte en une amélioration de la qualité de vie du plus grand nombre, on dira alors qu’il s’agit d’un bon code moral.
Sur ce plan, le passé des religions prosélytes politisées n’est guère reluisant. Certaines se sont assagies, mais d’autres, tel l’islamisme militant, continuent à faire des ravages.
Malgré leurs prétentions pro domo, les organisations religieuses n’ont rien de surnaturel. Elles sont toutes fondamentalement et sans exception des groupes d’intérêts bien humains qui font la promotion de leur vision du monde et leur conception du bien et du mal. En effet, toutes les religions sont des inventions humaines situées dans le temps, lesquelles sont le reflet des traditions et des superstitions de leur milieu. Elles sont en général dominées par des hommes bien en chair et en os. Leur code moral et leurs théories et leurs dogmes doivent être analysés sous cet angle, jugés dans les résultats concrets de leurs applications et, au besoin, réfutés.
Par-dessus tout, lorsque de tels groupes d’intérêts veulent imposer leur hégémonie envahissante à l’ensemble de la société et proposent de suspendre les droits démocratiques de tous au nom de leurs doctrines, il est du devoir de tout démocrate et de tout humaniste de les dénoncer et de les combattre.
Je conclus finalement en réaffirmant qu’il n’est pas nécessaire d’être religieux pour être moral. Au contraire, être fanatiquement religieux est en fait une façon répréhensible d’être immoral. C’était d’ailleurs la conclusion centrale de mon livre « Le Code pour une éthique globale ».
Néanmoins, en théorie du moins, il n’y a pas nécessairement d’antagonisme irréconciliable entre l’humanisme comme philosophie humaine universelle et les religions en tant qu’expériences humaines personnelles. Ce n’est que lorsque certaines religions deviennent des mouvements politiques agressifs, totalitaires et oppressifs qui piétinent la liberté et la dignité humaines qu’elles deviennent hostiles à la vision humaniste du monde.
En d’autres termes, ce n’est que lorsque certaines versions extrémistes et totalitaires des religions se tournent contre l’humanité qu’il peut y avoir une discordance entre l’humanisme et les religions extrémistes et qu’il devient impérieux de les combattre.
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