Michel Virard
Président de l'AHQ
Michel Virard est un des fondateurs de l’AHQ en 2005 avec Bernard Cloutier et Normand Baillargeon. Ingénieur et entrepreneur, il a également été administrateur des Sceptiques du Québec. il est depuis les tout débuts l’une des âmes dirigeantes de l’AHQ.
Francine ne voit plus du tout depuis l’âge de 33 ans mais depuis son enfance elle était déjà légalement aveugle. Suite à un manque puis un excès d’oxygène peu après sa naissance, elle a des problèmes, de gros problèmes. Elle ne marche plus non plus, ses jambes sont maintenant paralysées. Ses chiens Mira ont été ses amours depuis des années. Son fauteuil motorisé électrique lui permet heureusement de sortir, d’ailleurs elle s’occupe beaucoup des fleurs en avant de l’immeuble qu’elle habite, rue Gatineau, mais avec un double handicap de cette nature, ça lui prend un GPS spécial, pour aveugles, juste pour faire un peu plus que le tour du bloc.
Toute une histoire, ces GPS. Il y a six ans, des GPS pour les aveugles sont apparus. Chers, 2 000$. Comme Francine ne travaille plus, elle n’est pas admissible à ce genre de dépense. Alors elle s’est mise à vendre des chocolats dans la rue. Au bout d’un an, elle a pu amasser assez de sous pour se payer enfin son GPS. Le bonheur, une sorte d’indépendance retrouvée et une peur en moins: celle de se perdre. Pas évident de se servir de cette première version faite, il faut bien le dire, pour les aveugles qui sont capables de marcher : les commandes étaient tactiles. Quand vous contrôlez le fauteuil avec la main droite et votre chien Mira de la main gauche, ça prend une troisième main. Francine s’est débrouillée avec et elle aurait bien continué avec son premier GPS sauf que…ça n’a pas duré. Cette année son GPS a rendu l’âme. Irréparable, car désormais désuet et, de toute façon la carte originale des sites importants est maintenant désuète elle aussi.
Il y a maintenant de nouveaux GPS pour les aveugles, 1 000$ et avec des cartes qu’on peut mettre à jour et surtout qui fonctionnent par commande vocale. Une bénédiction quand on a que deux mains. Seulement voilà, Francine n’a pas plus les moyens et elle n’est pas plus admissible à une aide gouvernementale pour un GPS qu’elle ne l’était il y a cinq ans. Ce n’est pas considéré comme une nécessité. Après tout, c’est vrai, nos programmes sociaux ont d’autres priorités, toutes plus urgentes qu’un GPS pour une aveugle en chaise roulante et c’est difficile de blâmer nos gouvernants. Francine ne s’en plaint pas.
Elle a décidé qu’elle aurait quand même son second GPS même si ça lui prend encore un an. Elle a fait faire des photos d’elle-même avec sa dernière chérie, sa nouvelle chienne Mira. C’est la photo que vous voyez ci-dessus. Elle a demandé à son voisin, M. Bigras, de l’Imprimerie Côte-des-Neiges de lui couper des feuilles de papier 4×5,5. Il lui en a fait cadeau. Avec ses feuilles, ses photos, des cartons, de la colle, une bande adhésive elle a commencé à fabriquer des blocs-notes avec sa photo dessus. J’ai vu son « atelier ». C’est le coin de sa table. C’est là qu’elle produit des blocs-notes qu’elle vend ensuite dans la rue. Cinq dollars chaque. Les commerçants de Côte-des-Neiges la laisse s’installer. C’est là que ma conjointe Valérie l’a rencontrée. Valérie a le don de susciter les confidences et Francine lui a parlé. Au retour, Valérie m’a dit: « Toi et tes humanistes, vous pourriez pas faire quelque chose d’utile, non, pour une fois? » Valérie est comme cela. J’ai beau lui dire qu’à l’AHQ, on est une œuvre de charité, elle ne me croit pas vraiment, en tout cas, pas encore.
Alors j’ai dit: « OK, je vais m’en occuper ».
Ah oui, pourquoi elle dit « J’ai de la chance »? C’est bien simple: son jumeau est mort-né. Les autres bébés qui ont été intoxiqués par trop d’oxygène ont souvent des troubles pires, comme un retard mental. Francine, elle, a pu faire des études, jusqu’à l’université. Elle a ensuite travaillé, jusqu’à ce que ses jambes lâchent vraiment. C’était ça, sa « chance ».
Ce que vous ne savez pas non plus, c’est que Francine a beaucoup aidé des plus mal pris qu’elle: informaticienne, elle a démarré dans les années 90 la section informatique pour les handicapés visuels à l’Université de Montréal. Ils sont 400 inscrits cette année.
Vendredi 16 septembre, 14h. Grâce à un généreux donateur (le Dr Philippe Saint-Germain) nous avons maintenant atteint notre objectif de 1000$.
Je vous avais dit que je vous parlerai de la suite et bien voici le vidéo mis en ligne le 25 décembre 2011
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